« C’est très intime la relation qu’on entretient avec nos parfums, pour ma part, j’ai besoin d’en être fière et amoureuse. »
Nathalie Cetto
L’Air du Temps Antoinette Poisson raconté par ses parfumeurs
Floral, épicé, solaire, L’Air du Temps laisse sur son sillage un souffle baigné de gaieté et de légèreté depuis 1948.
Dans une nouvelle édition limitée, le parfum revient sous la forme d’une fragrance revisitée par les parfumeurs Louise Turner et Nathalie Cetto, encapsulée dans un gracieux flacon signé Antoinette Poisson, l'incontournable éditeur parisien de papiers peints décoratifs peints à la main.
L’occasion d’évoquer avec le duo de ‘nez’ l’esprit 2022 du jus légendaire et leur relation à la parfumerie.
Travailler sur un parfum à longue histoire, en quoi cela rend-il votre métier encore encore plus excitant ?
Louise : C’est un vrai enjeu. Vous avez beau tout comprendre de lui, c’est intimidant de se confronter à un jus aussi iconique et se sentir au niveau. Est-ce qu’on peut faire quelque chose d’aussi bien ? Jamais. Mais le défi est enthousiasmant.
Toute la complexité réside dans l’idée de respecter son ADN, ses valeurs, tout en lui infusant une nouvelle personnalité.
Nathalie : C’est exactement ça. C’est aussi intimidant que gratifiant de s’attaquer à ces monuments avec une signature aussi singulière.
Là, chacun pourra retrouver sa floralité mais dans une version sensuelle plus gourmande.
« C’est intimidant de se confronter à un jus aussi iconique et se sentir au niveau. »
Louise Turner
Comment créé-t-on un parfum à deux nez ?
Louise : Ce n’est pas toujours évident de créer à deux parfumeurs, cela nécessite un certain niveau de complicité et d’admiration, je pense.
Nathalie et moi avons déjà pas mal travaillé ensemble, on se connait bien, donc, j’imagine que cela tient à une entente fluide mais aussi à une manière singulière à chacune de raconter une histoire.
Dans le cas de L’Air du Temps, l’exemple est assez drôle, c’est presque un cas d’école. Entre nos deux parfums, ça a tout de suite été la rencontre parfaite: celui de l’une était fait pour celui de l’autre.
Nathalie : Oui, c’est très rare d’arriver à ce point, à imbriquer un parfum dans l’autre et en ressortir un jus harmonieux.
Le parfum de Louise était très tourné vers la sensualité alors que le mien l’était plus vers la floralité. L’un et l’autre se sont naturellement trouvés.
Quand vous composez un parfum, pensez-vous en priorité à ceux qui le porteront ou est-ce d’abord un plaisir égoïste ?
Nathalie : Un peu des deux. Je pense souvent à ceux qui le porteront mais cela reste un plaisir égoïste, pas dans la finalité, mais dans le faire. Lorsqu’on se lance dans un nouveau projet, on sait qu’on va travailler des mois et des mois dessus, aussi c’est essentiel de travailler des accords qu’on aime. Le plaisir dans ce métier, c’est primordial.
Et puis, c’est très intime la relation qu’on entretient avec nos parfums, pour ma part, j’ai besoin d’en être fière et amoureuse.
Louise : Je dirais plutôt égoïste, oui. C’est difficile de travailler des notes que je n’aime pas. Si cela ne me plait pas, je ne pense pas que cela puisse plaire aux autres.
« Que laisse L’Air du Temps sur son sillage ? Un souffle floral, épicé, presque solaire. De la joie. Quelque chose qui ne s’explique pas et qui donne le sourire. »
Louise Turner et Nathalie Cetto
Comment décririez-vous L’Air du Temps en 3 sensations ?
Nathalie : Souffle. Peau. Épicé.
Louise : Souffle. Sensualité. Enveloppement.
Quel rôle joue la mode dans votre processus de création ? Qu’avez-vous emprunté de l’esprit de Nina Ricci dans ce jus ?
Nathalie : D’une manière générale, la mode permet de définir l’univers, quel esprit, quelle féminité des parfums, c’est donc génial quand il y a une cohérence entre les deux mondes comme chez Nina Ricci. Sa mode est ultra-lisible mais singulière. Il fallait retrouver un peu de tout ça.
Louise : Effectivement, on me dit Nina Ricci, je sais exactement ce que sa mode représente. Elle est joyeuse, très colorée, féminine, intemporelle, pétillante ! L’Air du Temps, j’espère, reflète cet esprit.
Si L’Air Du Temps était une silhouette ?
Nathalie : La première image qui me vient, c’est une cariatide, ces statues de femmes drapées, puissantes, soutenant sur leur tête une corniche. Mais il y a aussi les plumes de la colombe, le duvet...
Louise : Ce parfum est tellement associé à son flacon avec ses deux colombes sur le bouchon, je vois tout de suite la figure de l’oiseau. C’est une silhouette avec des ailes.
L’odeur de l’intemporalité ?
Nathalie : Les Musc, tant ils tiennent des heures et des heures.
Louise : Le Patchouli. On a beau le traiter de manière différente, il reste éternellement inéchangeable.
L’odeur du bonheur ?
Louise : Le Chèvrefeuille, ça me rappelle mon jardin. C’est une odeur rassurante, positive. Elle ne me fatigue jamais, je l’adore.
Nathalie : Les notes d’agrumes. Pour le pétillant, la fraîcheur, la joie. L’odeur du zeste d’un citron, jaune ou vert, me réjouit.
L’odeur de la femme ?
Nathalie : Cela invite une forme de sensualité et la sensualité que je trouve la plus belle, c’est l’accord chypré.
Louise : Une note musquée. C’est sensuel et propre et blanc. C’est une odeur sans être un parfum, presque une seconde peau.